Et après ?…

« La situation dans laquelle nous vivons est propice à une réflexion et à l’expression de projets novateurs. N’est-ce pas le temps d’approfondir nos réflexions sur le futur de l’ESS ? » questionne Jean-François Draperi.
En pleine période de confinement, d’inquiétudes mais aussi d’espoirs, petit tour d’horizon des approches de personnalités référentes dans l’ESS et connues des acteurs du territoire.

Et après ?

C’est la question posée par Jean-François Draperi (1) à l’ouverture du n° 356 de la Recma.
« Du point de vue de l’économie sociale, chacun peut observer la multiplication des solidarités. Une parmi cent : des milliers de couturières – plus de 10 000 – de la région des Hauts-de-France (et d’ailleurs) fabriquent de façon volontaire et gratuite des masques protecteurs. Elles témoignent que la grande région manufacturière qui a vu supprimer tant d’emplois dans le secteur reste une terre de textile et de solidarités. Au-delà des masques produits, les couturières donnent un sens et une richesse sans équivalents à leur temps. Sans investisseur, ni mesure ni recherche d’un Social Return on Investment, cet élan sera-t-il le prélude d’une nouvelle coopération de travail et d’une forme de renaissance professionnelle du secteur ? Pourquoi pas ?« 

Vivre et résister

Dès le 18 mars, Hugues Sibille (2) publie sur le site du Labo de l’ESS un édito mobilisateur.
« Le Coronavirus doit être aussi une pédagogie d’autres menaces et dérèglements qui sont devant nous. Ce que l’ESS porte depuis des années (coopération, solidarité, absence d’esprit de lucre, responsabilité…), résonne comme jamais : dans les interventions récentes des uns et des autres, y compris au sommet de l’État ou de l’Europe, on sent une brèche. C’est le moment de dire « chiche » haut et fort.
Dans l’après Coronavirus, nous, ESS, et acteurs des transformations, disposerons de la légitimité de ceux qui ont mis en cause depuis longtemps l’hyper financiarisation, l’hyper consommation, l’hyper compétition, la mondialisation non régulée etc. Notre devoir demain ne sera pas de dire « nous avions raison, on vous l’avait bien dit » mais de répondre présents sur les voies et moyens de faire autrement. »

La pensée confinée

Philippe Frémeaux (3), le 30 mars, prévient : « Si nous voulons que cette crise soit réellement une opportunité pour réorienter l’activité économique vers « ce qui compte vraiment », pour reprendre les termes du Forum pour d’autres indicateurs de richesse (FAIR), il faut assumer de se placer radicalement dans une perspective post-croissance et non chercher uniquement ce qui va permettre de relancer rapidement l’activité sans discernement dans les mois qui suivront la fin du confinement. »

Vers la société du commun

Dans une tribune au « Monde », le 18 avril, Hervé Defalvard (4) voit dans les actions locales d’accès et de gestion des « biens communs » l’ébauche de ce que serait le jour d’après, à condition que ces initiatives trouvent un débouché politique. Il se méfie des « nombreux appels à un changement profond de modèle économique ». Il oppose aux phrases révolutionnaires la méthode de « l’évolution révolutionnaire » prônée par Jean Jaurès.
« Les forces sociales sont aujourd’hui celles des territoires dont les habitants se regroupent pour décider et agir afin de pouvoir construire en commun une vie bonne pour tous, dans un équilibre durable avec les êtres vivants partageant le même milieu. Longtemps séparées, ces forces sociales joignent les luttes contre les discriminations d’origine, les inégalités, le réchauffement climatique et pour la biodiversité. Elles portent une politique de l’émancipation du bas vers le haut : celle locale des communs autogérés, et celle des personnes qui, par ces collectifs, retrouvent la maîtrise de leur vie. »
« La société du commun ne supprime ni la petite propriété privée du marché ni la propriété publique de l’État, mais les subordonne aux droits d’usage qui assurent concrètement l’accès à une vie bonne pour toutes et tous.« 

Penser un après plus écologique

Le site d’informations en ligne Reporterre (5) – auquel nous empruntons l’image ci-dessus – recense dans son article du 8 avril les nombreuses initiatives en cours.
« Le monde sortira un jour de la pandémie du Covid-19 et devra relever un système économique exsangue, voire le transformer en profondeur pour que les mêmes maux n’apparaissent plus. Afin de préparer dès maintenant la suite, les initiatives fleurissent : parlementaires, associatifs, syndicats… »

(1) Jean-François Draperi, chercheur au CNAM, directeur de la Recma, était l'invité des forums de l'ESS 05 en 2008 et 2015
(2) Le Labo de l'ESS présidé par Hugues Sibille était partenaire des forums de l'ESS 05 en 2009 et 2018
(3) Philippe Frémeaux, éditorialiste à Alternatives Économiques, a ouvert le forum 2014 de l'ESS 05
(4) Hervé Defalvard, responsable de la chaire ESS à Marne-la-Vallée, est intervenu au forum 2016 de l'ESS 05 à Chorges
(5) Reporterre, le quotidien de l'écologie est indépendant, sans publicité et en accès libre