QVT Chorum

Des actions simples pour la qualité de vie au travail

Quelles sont les marges de manœuvres pour mener une démarche de qualité de vie au travail ?
Les réponses de Marine Boyer, cheffe de projet Cides, en avant-goût de la conférence de Chorum-Cides le 21 novembre à Paris.

Marine Boyer était l’invitée du colloque professionnel organisé à Gap en novembre 2015 par l’Udess 05 en partenariat avec l’UDES et Chrorum-Cides sur la qualité de vie au travail (QVT) des salariés et des dirigeants de l’ESS.

L’article reproduit ci-dessous a été publié sur le site de Chrorum-Cides le 6 novembre 2018.

Fil CIDES : On parle beaucoup de qualité de vie au travail, de bonheur au travail, d’entreprise libérée… qu’entend-on par qualité de vie au travail ?

Marine Boyer : C’est en effet très vaste. Mais on peut retenir que la qualité de vie au travail se définit comme une perception de bien-être individuel et collectif liée aux conditions matérielles et organisationnelles, au contenu du travail et aux possibilités d’expression des salariés. Dans cette approche, qualité de vie au travail et qualité DU travail sont indissociables. Dès lors, la qualité de vie au travail englobe, de fait, différentes dimensions : la santé au travail bien évidemment, le contenu et l’organisation du travail, l’autonomie, les relations et le climat social, le partage de l’information, les parcours professionnels et le développement des compétences, le management, la participation et l’expression des salariés, l’égalité professionnelle…

Qu’est-ce qui déclenche l’intérêt d’entreprises de l’ESS pour la qualité de vie au travail ?

MB : Les structures peuvent être amenées à vouloir mener une démarche qualité de vie au travail en raison de difficultés en termes de climat social, des taux d’absences au travail ou de turn-over en augmentation. Les symptômes peuvent aussi être des signes d’usure professionnelle, des plaintes d’usagers, des situations de violences ou d’agressivité avec les personnes accompagnées. Les changements à venir entrainant une évolution des métiers peuvent également être une raison.

Souvent, les structures nous font part d’une envie d’aborder la question des conditions de travail, de l’organisation du travail sous un angle positif et pas uniquement selon une approche centrée sur les risques, notamment psychosociaux.

Dans d’autres cas, il n’y a pas de problème majeur mais l’entreprise souhaite valoriser ce qui existe et a le souci d’améliorer ce qui peut l’être et souhaite donner une structure, une cohérence aux actions menées à travers une démarche QVT.

De manière plus formelle et générale, l’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) identifie trois types d’enjeux pour les entreprises : les enjeux liés au contenu avec le contenu et l’organisation du travail, les enjeux sociétaux, liés à la population au travail et les enjeux liés aux évolutions du marché de l’entreprise (voir encadré).

Comment mettre en place une démarche d’amélioration de la qualité de vie au travail ?

MB : Le prérequis est une volonté de la direction générale, du conseil d’administration d’agir sur cette thématique, notamment au regard des enjeux auxquels est confrontée la structure. Je rajouterais qu’il faut également avoir la volonté d’accepter de recueillir les remontées venant du terrain et d’ancrer la démarche dans le dialogue social. Sur le plan méthodologique, il y a quelques principes clés à respecter :

  • Constituer un comité de pilotage auquel participent les représentants des salariés
  • Se mettre d’accord sur les enjeux propres à la structure et sur les objectifs de la mise en place d’une démarche QVT
  •   Élaborer un diagnostic de la situation : à partir des données sociales de la structure (santé, parcours professionnels, accès à la formation…) et aussi à travers des enquêtes, des entretiens individuels ou collectifs avec des salariés
  • Partager les constats issus du diagnostic au sein du comité de pilotage
  • Définir un plan d’action : avec un calendrier, des échéances, des référents…En particulier, expérimenter les actions définies avant de les généraliser. Par exemple, au sein d’un service d’abord…
  • Suivre le plan d’action, et évaluer les actions menées.

Quels sont les facteurs de succès ?

MB : Un pilotage paritaire et avoir le souci d’être proche du terrain et du travail tel qu’il est réellement vécu. Il faut écouter ce qui émane de l’expression des salariés, se baser sur des expérimentations sur des périmètres limités et se donner le droit à l’erreur. Je dirai aussi qu’il faut garder à l’esprit que des actions simples, pragmatiques, même à petite échelle, ont des effets bénéfiques, d’autant plus si elles émanent du terrain.

Par exemple ?

MB : Je peux en donner plusieurs. Sur le volet participation et expression des salariés, une action simple, à l’occasion d’un nouveau projet de construction ou de rénovation dans un foyer de vie, est de tenir compte des propositions d’aménagement des chambres des résidents, formulées par les aides soignants.

Autre exemple…Dans un EHPAD, les salariés ont collectivement établi une procédure d’accompagnement des résidents en cas d’absence d’un des membres de l’équipe. Cette initiative donne de la visibilité sur le rôle de chacun en cas de situation dégradée, renforce la solidarité au sein de l’équipe et assure la qualité du service auprès des résidents.

Plus généralement, pour résoudre des difficultés, des dysfonctionnements au sein d’une équipe de travail, le fait d’instaurer des espaces de discussion sur le travail qui visent à échanger collectivement sur les contraintes d’une situation de travail mais aussi sur les ressources sur lesquels les individus s’appuient, permet de faire émerger des propositions d’amélioration adaptées aux situations réellement vécues par les salariés.

 
Conférence le 21 novembre 2018 à Paris
Santé et qualité de vie au travail dans l’économie sociale et solidaire

Des pistes d’action pour interroger le travail

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Les trois enjeux de la QVT selon l’Anact

  • Les enjeux liés au travail : en lien avec le contenu et l’organisation du travail, l’autonomie, les possibilités d’expression, le management participatif, le développement des compétences…Les effets recherchés portent sur la santé au travail, la qualité du management et de l’organisation du travail, le renforcement de l’initiative et des marges de manœuvres.
  • Les enjeux sociétaux : en lien avec les caractéristiques des populations au travail (âge, genre, handicap, parentalité, éloignement domicile/lieu de travail…). A travers la négociation sur des sujets tels que l’égalité professionnelle, les séniors, le handicap, la pénibilité, la conciliation vie privée-vie familiale, la diversité, le droit à la déconnexion et avec des dispositifs tels qu’une charte de la diversité, l’accès à des systèmes de garde d’enfants, d’aide aux aidants, d’accompagnement au retour à l’emploi après une logue absence, l’accès facilité aux transports en communs, covoiturage… les effets recherchés sont de faciliter le maintien dans l’emploi, renforcer l’attractivité de l’entreprise et le sentiment d’équité et de cohésion. La négociation sur ces sujets est une obligation légale pour certaines entreprises.
  • Les enjeux liés au marché : en vue de répondre aux exigences des donneurs d’ordre, des clients, aux évolutions technologiques, faire face à l a concurrence…Il s’agira d’innover sur le plan des produits ou services, des processus. Les dimensions de la qualité de vie au travail concernées vont être le développement des compétences, les parcours professionnels, l’adaptation des postes de travail, l’évolution des pratiques… avec pour effet recherché de renforcer le sentiment de sécurité face à son avenir professionnel et de réduire les incertitudes face au changement, de favoriser le développement professionnel.